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Sa`îd Ibn `Âmir

jeudi 30 mai 2002

Sa`îd Ibn `Âmir Al-Jumahî fut parmi les milliers de personnes qui partirent pour la région de Tan`îm, aux alentours de la Mecque, répondant à l’invitation des Qurayshites à assister à la mise à mort de Khubayb Ibn `Adiy, un des compagnons du Prophète — paix et bénédictions sur lui — qu’ils avaient capturé traîtreusement.

Avec sa jeunesse et sa force exubérantes, Sa`îd bouscula la foule pour rejoindre en tête du cortège les Qurayshites de haut rang tels que Sufyan Ibn Harb ou Safwân Ibn Ummayah.

Il pouvait voir le prisonnier , attaché avec des chaînes, les femmes et les enfants le poussant vers le lieu préparé pour sa mort. La mort de Khubayb devait servir de revanche aux pertes subies par les Qurayshites durant la bataille de Badr.

Lorsque la foule arriva au lieu prévu, Sa`îd Ibn `Âmir prit place de sorte à surplomber Khubayb. Tandis que ce dernier approchait de la croix en bois, il demanda d’une voix ferme mais pausée entre les cris des femmes et des enfants : " Laissez moi prier deux rak’ats avant de mourir. "

Les Qurayshites acceptèrent. Sa`îd regardait Khubayb prier en direction de la Ka`bah. Comme ces deux rak’ats semblaient belles et paisibles ! Puis, il vit Khubayb faire face aux chefs de Quraysh : " Par Dieu, si vous pensez que j’ai demandé à prier par peur de la mort, vous vous trompez, dit-il. "

Sa`îd vit alors les gens commencer à démembrer le corps de Khubayb alors que celui-ci était toujours vivant, tout en se raillant de lui : " Ne préférerais-tu pas voir Muhammad à ta place et être libre ? "

Tandis que son sang coulait, il répondit : " Par Dieu, je n’aimerais pas être sain et sauf au sein de ma famille tout en sachant qu’une seule épine a pu blesser Muhammad. "

Les poings levés, les Qurayshites criaient : " Tuez-le ! Tuez-le ! "

Sa`îd regarda Khubayb lever les yeux au ciel au-dessus de la croix de bois : " Considère-les tous, ô Seigneur !, dit-il, détruis-les et n’en épargne aucun ! "

Ensuite, Sa`îd ne put compter le nombre d’épées et de lances qui transpercèrent le corps de Khubayb.

Les Qurayshites retournèrent à la Mecque et oublièrent rapidement cette exécution. Khubayb et sa mort étaient toujours présents dans l’esprit de Sa`îd qui approchait maintenant de l’âge adulte. Dans ses rêves, Sa`îd le voyait devant lui, calme et satisfait, priant ses deux rak’ats, devant la croix de bois. Il entendait également l’écho de sa voix lorsqu’il invoqua le châtiment d’Allâh sur les Qurayshites. Il craignait que le tonnerre ou toute autre calamité ne le frappe.

Khubayb, par sa mort, avait appris à Sa`îd ce qu’il n’avait jamais réalisé jusqu’alors : que la vraie vie était la foi et la conviction ainsi que la lutte dans le sentier de la foi, même jusqu’à la mort. Il lui apprit également qu’une foi profondément ancrée peut faire des merveilles et des miracles. Il lui apprit autre chose : l’homme qui inspirait un amour tel que celui de Khubayb ne pouvait être qu’un prophète bénéficiant de la faveur divine.

Ainsi, le cœur de Sa`îd s’ouvrit à l’islam. Il se leva dans une assemblée de Quraysh et annonça qu’il s’affranchissait de leurs pêchés et de leur fardeau. Il renonça à leurs idoles et leurs superstitions et proclama son entrée dans la religion de Dieu.

Sa`îd Ibn `Âmir émigra vers Médine et s’attacha au Prophète — paix et bénédictions sur lui —. Il prit part, avec le Prophète — paix et bénédictions sur lui —, à la bataille de Khaibar ainsi qu’à d’autres engagements par la suite. Après la mort du Prophète — paix et bénédictions sur lui —, Sa`îd continua de servir activement l’islam sous ses deux successeurs Abu Bakr et `Omar. Il mena la vie unique et exemplaire du croyant soucieux de l’au-delà. Il rechercha la satisfaction et les bénédictions de Dieu bien plus que les désirs égoïstes et les plaisirs matériels.

Abû Bakr et `Omar le connaissaient pour son honnêteté et sa piété. Ils l’écoutaient et suivaient ses conseils. Sa`îd vint une fois voir `Omar au début de son califat et dit : " Je t’invite à craindre Dieu lorsque tu traites avec les gens et à ne pas craindre les gens dans ta relation avec Dieu. Ne laisse pas les actions dévier de tes paroles car le meilleur discours est celui qui est confirmé par l’action. Tiens compte de ceux à qui ont été confiées les affaires des musulmans, de près ou de loin. Aime pour eux ce que tu aimes pour toi et ta famille et rejète pour eux ce que tu rejètes pour toi et ta famille. Surmonte tout obstacle pour atteindre la vérité et ne crains pas les dires de ceux qui critiquent les prescriptions de Dieu.
- Qui peut être à la hauteur de cela Sa`îd ?, demanda `Omar.
- Un homme tel que toi, à qui Dieu a confié les affaires de la communauté de Muhammad et qui se sent responsable vis à vis de Dieu seul, répondit Sa`îd.
- Sa`îd, dit-il, je te nomme gouverneur de Hims.
- `Omar, implora Sa`îd, je te demande par Dieu de ne pas causer mon égarement par la préoccupation des affaires de ce bas monde.
- Tu as placé sur moi la responsabilité du califat et maintenant tu m’abandonnes !, dit `Omar fâché.
- Par Dieu, je ne t’abandonne pas, répondit rapidement Sa`îd. "

`Omar le nomma donc gouverneur de Hims en Syrie et lui offrit une somme d’argent. " Que dois-je faire de ceci, ô Amir Al-Mu’minîn ?, demanda Sa`îd, l’allocation de bayt al-mâl} (Trésor public) sera plus que suffisante pour mes besoins. " Avec cela, il se dirigea vers Hims.

Quelques temps après, une délégation en provenance de Hims, composée de personnes en qui `Omar avait confiance, vint en visite à Médine. Il leur demanda d’inscrire les noms des pauvres à Hims afin qu’il puisse subvenir à leurs besoins. Ils préparèrent une liste où le nom de Sa`îd Ibn `Âmir était mentionné.

" Qui est Sa`îd Ibn `Âmir ?, demanda `Omar.
- Notre amir, répondirent-ils.
- Votre amir est pauvre ?, demanda `Omar, perplexe.
- Oui, affirmèrent-ils, par Dieu, plusieurs jours passent sans qu’un feu ne soit allumé dans sa maison. "

`Omar en fut très ému et il pleura. Il prit mille dinars, les mis dans une bourse et dit : " Faites-lui parvenir mon salut et dites-lui que l’Emir des Croyants a envoyé cet argent pour l’aider à subvenir à ses besoins. "

La délégation se présenta à Sa`îd avec la bourse. Quand il vit qu’elle contenait de l’argent, il la refusa et dit : " A Dieu nous appartenons et vers Lui sera notre retour. "

Il le dit comme si un grand malheur venait de le toucher. Sa femme, alarmée, se rua vers lui et demanda : " Que se passe-t-il Sa`îd ? Est-ce que le Calife est mort ?
- C’est pire que ça.
- Les musulmans ont-ils été vaincus lors d’une bataille ?
- C’est pire que ça. Ce bas monde est tombé sur moi pour corrompre mon au-delà et créer le désordre dans ma maison.
- Alors débarrasse-toi de lui, dit-elle sans rien savoir des fameux dinars.
- M’aideras-tu à le faire ?, demanda-t-il "

Elle accepta. Il prit les dinars, les mit dans un sac et les distribua aux pauvres parmi les musulmans.

Peu de temps après, `Omar Ibn Al-Khattâb se rendit en Syrie pour se rendre compte des conditions qui y régnaient. Lorsqu’il arriva à Hims, également appelée " petite Kûfah " car, comme à Kûfah, ses habitants se plaignaient de leurs dirigeants, il demanda ce qu’ils pensaient de Sa`îd. Ils se plaignirent de quatre habitudes qu’il avait, toute aussi grave l’une que l’autre.

" Je vais vous mettre face à face, promit `Omar, et je jure par Dieu que mon opinion à son sujet n’en sera pas touchée. J’ai toujours eu une grande confiance en lui. "

Quand le rendez-vous fut fixé, `Omar les questionna sur les plaintes qu’ils avaient à son sujet.

" Il vient nous voir seulement quand le soleil est déjà bien haut, dirent-ils
- Que réponds-tu à cela Sa`îd ?, demanda `Omar. "

Sa`îd resta silencieux un instant, puis il dit : " Par Dieu, je ne voulais vraiment pas dire ceci mais il semble ne pas y avoir d’autre solution. Ma famille ne dispose pas d’aide domestique alors je me lève chaque matin et je prépare la pâte pour le pain. J’attends qu’elle lève et je la fais cuire. Ensuite, je sors voir les gens.
- De quoi d’autre vous plaignez-vous ? demanda `Omar.
- Il ne répond à personne pendant la nuit, dirent-ils.
- Par Dieu, dit Sa`îd à contrecœur, j’aurais voulu garder cela pour moi. Je réserve ma journée pour eux et ma nuit pour Dieu, qu’Il soit glorifié.
- Et quelle est votre autre plainte à son sujet ?, demanda `Omar.
- Un jour par mois il ne vient pas nous voir, dirent-ils.
- Je n’ai pas d’aide domestique, ô Amir Al-Mu’mineen !, répondit Sa`îd, et je n’ai pas de vêtements à part ceux que je porte. Une fois par mois, je les lave et j’attends qu’ils sèchent. Puis, je sors plus tard dans la journée.
- Y a-t-il une autre plainte ? demanda `Omar.
- De temps en temps, il s’évanouit pendant les réunions, dirent-ils.
J’ai été témoin de la mise à mort de Khubayb Ibn `Adiyy alors que j’étais mécréant, répondit Sa`îd. J’ai vu les Qurayshites le découper et lui dire : " Ne préférerais-tu pas voir Muhammad à ta place et être libre ?". A cela, Khubayb a répondu : " Par Dieu, je n’aimerais pas être sain et sauf au sein de ma famille tout en sachant qu’une seule épine a pu blesser Muhammad. " Par Dieu, chaque fois que je me rappelle ce jour où je ne l’ai pas secouru, je pense seulement que Dieu ne me pardonnera pas et je m’évanouis.
- Louange à Dieu, dit `Omar, mon estime à son sujet n’a pas été entachée. "

Plus tard, il envoya mille dinars à Sa`îd pour l’aider. Quand sa femme vit la somme, elle dit : " Louange à Dieu qui nous a enrichi pour ton service ! Achète-nous quelques provisions et procure-nous une aide domestique.
- N’y a-t-il pas une façon meilleure de dépenser cette somme ?, demanda Sa`îd. Dépensons-la pour chaque personne qui viendra à nous. Notre récompense sera meilleure car nous agirons pour Dieu.
- Cela sera une meilleure chose, acquiesça-t-elle. "

Il mit les dinars dans de petits sacs et dit aux membres de sa famille : " Amenez ceci à la veuve d’untel, aux orphelins d’untel, aux nécessiteux de telle famille et aux indigents de la famille de telle personne. "

Sa`îd Ibn `Âmir Al-Jumahî faisait parti de ceux qui se sacrifiaient même lorsqu’ils étaient lourdement touchés par la pauvreté.

P.-S.

Traduit de "Companions of The Prophet", Vol.1, écrit par Abdul Wâhid Hâmid.

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