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Rabî`ah Ibn Ka`b

samedi 13 avril 2002

Voici l’histoire de Rabî`ah, rapportée de ses propres mots :

" J’étais encore jeune quand la lumière de la foi a rayonné en moi et quand mon cœur s’est ouvert aux enseignements de l’Islam. Lorsque mes yeux ont aperçu le Messager de Dieu — paix et bénédictions sur lui — pour la première fois, je l’ai aimé d’un amour qui envahit tout mon corps. Je l’aimais plus que toute autre personne.

Un jour, je me dis : " Malheur à toi Rabî`ah. Pourquoi ne te mets-tu pas entièrement au service du Messager de Dieu — paix et bénédictions sur lui — ? Va le voir et propose-lui cela. S’il est satisfait de toi, tu trouveras le bonheur en étant auprès de lui. Tu seras comblé par ton amour pour lui et tu auras la chance d’obtenir le bien dans ce monde et dans l’autre.

Ainsi, j’espérais qu’il m’accepterait à son service. Il n’anéantit pas mes espoirs. Il fut heureux de me prendre comme serviteur. À partir de ce jour, je vécus dans l’ombre du noble Prophète — paix et bénédictions sur lui —. J’allais avec lui partout où il allait. Je me déplaçais dans le même sens que lui, où qu’il allait. Chaque fois qu’il lançait un regard en ma direction, je faisais un bond pour rester à ses côtés. Chaque fois qu’il exprimait un besoin, je m’empressais d’y répondre.

Je le servais tout au long de la journée. Lorsque que le jour arrivait à sa fin, qu’il avait prié la prière de l’Icha et qu’il s’était retiré dans sa maison, je pensais alors à partir. Mais je me disais aussitôt : " Où vas-tu aller, Rabî`ah ? Peut-être va-t-il falloir que tu fasses quelque chose pour le Prophète durant la nuit. "Alors je restais, assis à sa porte et ne m’éloignais pas du seuil de sa maison. Le Prophète passait une partie de la nuit en prière. Je l’entendais réciter le Chapitre ouvrant du Coran et il continuait à réciter certaines fois pendant le tiers ou le quart de la nuit. Alors, je commençais à fatiguer et je partais ou bien je laissais mes yeux se fermer et m’endormais.

Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — avait l’habitude, lorsque quelqu’un lui rendait service, de lui rendre ce service avec quelque chose d’encore plus excellent. Il voulait faire quelque chose pour moi en retour de mes services à son égard. Alors, un jour, il vint me voir et me dit :
" Ô Rabî`ah Ibn Ka`b. "
" Labbayk ya rasulullah wa sadayk - à tes ordres, Ô Messager de Dieu et que Dieu t’accorde le bonheur " répondis-je.
" Demande-moi tout ce que tu veux et je te le donnerai. "

Je réfléchis quelques instants puis je dis :
" Laisse-moi un peu de temps, Ô Messager de Dieu, pour réfléchir à ce que je vais te demander. Puis, je te le ferai savoir. "
Il accepta.

À cette époque, j’étais jeune et pauvre. Je n’avais ni famille, ni richesse, ni lieu ou résider. Je prenais refuge dans la Suffah de la mosquée avec les musulmans qui étaient pauvres comme moi. Les gens nous appelaient les " invités de l’Islam ". Chaque fois qu’un musulman apportait quelque chose par charité pour le Prophète — paix et bénédictions sur lui —, il nous envoyait tout. Et si quelqu’un lui faisait un présent, il en prenait une partie et laissait le reste pour nous.

Ainsi, j’eus l’idée de demander au Prophète — paix et bénédictions sur lui — quelques biens matériels me permettant d’échapper à la pauvreté et de ressembler à tous ceux qui possédaient de l’argent, une femme et des enfants. Très vite, cependant, je me dis : " Puisses-tu périre Rabî`ah ! Ce monde n’est qu’éphémère et il va disparaître. Tu y as ta part de subsistance qu’Allâh t’a accordée et qui doit te parvenir. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — a sa place auprès de Dieu et aucune demande ne lui sera refusée. Demande-lui donc de demander à Allâh de t’accorder une récompense dans l’au-delà.

Je fus heureux et satisfait de cette idée. J’allai voir le Prophète — paix et bénédictions sur lui — et il me demanda :

" Qu’as-tu à me dire, Ô Rabî`ah ? "
" Ô Messager de Dieu " dis-je " je te demande d’implorer Dieu le Très Haut en faveur afin qu’il fasse de moi ton compagnon au Paradis. "
" Qui t’a conseillé de me demander une telle chose ? " Demanda le Prophète.
" Non, par Dieu, dis-je, personne ne m’a conseillé. Mais quand tu m’as dit ’demande-moi tout ce que tu veux et je te le donnerai’ j’ai d’abord pensé à te demander quelque chose des biens de ce monde. Puis, au bout d’un certain temps, je fus guidé vers le choix de te demander quelque chose de permanent et de durable au lieu de ce qui est éphémère et périssable. Ainsi, je t’ai demandé d’implorer Allâh en ma faveur afin que je sois ton compagnon au Paradis. "

Le Prophète Paix et Bénédiction de Dieu sur lui garda le silence un long moment puis il demanda :

" Une autre demande à part celle-ci Rabî`ah ? "
" Non, Ô Messager de Dieu, rien ne peut aller avec ce que je t’ai demandé. "
" Alors, dans ce cas, assiste-moi en faisant de multiples prosternations à Dieu. "

Alors je commençai à me consacrer à la dévotion afin d’obtenir le bonheur d’être aux côtés du Prophète — paix et bénédictions sur lui — au Paradis tout comme j’ai eu le bonheur d’être à son service et d’être son compagnon dans ce bas monde.

Peu de temps après, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — m’appela et me demanda :

" Ne veux-tu pas te marier, Rabî`ah ? "
" Je ne veux pas que quoi que ce soit puisse me distraire de ton service. " Répondis-je. " De plus, ne n’ai rien à donner comme dote à une femme, ni de lieu pour la loger. "

Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — resta silencieux. Quand il me vit une autre fois, il me demanda : " Ne veux-tu pas te marier, Rabî`ah ? " Je lui donnai la même réponse. Puis, une fois seul, je regrettai ma réponse et me dit : " Malheur à toi, Rabî`ah. Par Dieu, le Prophète sait mieux que toi ce qui est bon pour toi dans ce monde et dans l’autre et il sait également mieux que toi ce que tu possèdes. Par Dieu, si le Prophète — paix et bénédictions sur lui — te demande si tu veux te marier, tu dois répondre de façon positive. "

Longtemps après, le Prophète me demanda encore :
" Ne veux-tu pas te marier Rabî`ah ? "
" Oh ! Oui, Messager de Dieu " répondis-je, " mais qui acceptera de se marier avec moi alors que je suis dans l’état que tu sais ? "
" Vas voir la famille d’untel et untel et dis-leur : le Prophète vous demande de me donner votre fille en mariage. "

Timidement, je me rendis chez cette famille et dis :

" Le Messager d’Allâh, Paix sur lui, m’a envoyé pour vous demander de me donner votre fille en mariage. "
" Notre fille ? " Demandèrent-ils d’un air étonné.
" Oui " répondis-je.
" Bienvenue au Messager de Dieu et bienvenue à son messager. Par Dieu, Le messager du Messager de Dieu ne doit rentrer que si sa mission est accomplie. "

Alors ils firent un contrat de mariage entre elle et moi. Je retournai auprès du Prophète et lui racontai :

" Ô Messager de Dieu, je reviens du meilleur des foyers. Ils m’ont cru, ils m’ont accueilli et ils ont fait un contrat de mariage entre leur fille et moi. Mais où vais-je trouver sa dote ? "

Le Prophète alla alors chercher Buraydah Ibn Al-Khasib, une des plus importantes personnes de ma tribu, les Banu Asiam, et il lui dit : " Ô Buraydah, rassemble le poids d’un noyau de date en or pour Rabî`ah ! "

Il s’en chargea et le Prophète me dit : " Apporte-leur ceci et dit leur que c’est la dote pour leur fille " J’en fis autant et ils l’acceptèrent. Ils furent satisfaits et dirent : " C’est beaucoup et bien. " Je revins vers le Prophète et lui dis : " Je n’ai jamais vu de gens aussi généreux qu’eux. Ils furent satisfaits de ce que je leur ai apporté même si c’était peu… Où puis-je trouver quelque chose pour la célébration du mariage, Ô Prophète de Dieu ?"

Le Prophète demanda à Burayda : " Trouve un bélier pour Rabî`ah ! " Ils me ramenèrent un gros bélier et le Prophète me dit : " Va voir Aishah et dit lui de te donner tout l’orge qu’elle possède. "

Aishah me donna un sac contenant sept sâ` (unité de mesure) d’orge et dit : " Par Dieu, nous n’avons plus d’autre nourriture. " Je me rendis chez la famille de ma femme avec le bélier et l’orge. Ils dirent : " Nous préparerons l’orge, mais dit à tes amis de préparer le bélier pour toi. "

Nous abattîmes, dépeçâmes et cuisinâmes le bélier. Nous avions donc du pain et de la viande pour la célébration du mariage. J’invitai le Prophète qui accepta mon invitation.

Puis le Prophète m’offrit un bout de terre près de celui d’Abû Bakr. À partir de ce moment, l’ici-bas et les biens matériels commencèrent à me préoccuper. J’eus même une dispute avec Abû Bakr au sujet d’un palmier :

" Il est sur ma terre ! " insistai-je.
" Non, sur ma terre ! " répliqua Abû Bakr.

Nous commençâmes à nous disputer. Abû Bakr me dit un mot qu’il regretta aussitôt et me dit :

" Rabî`ah ! Dis-moi la même chose afin que cela soit considéré comme une riposte justifiée. "
" Non par Dieu, je ne le ferai pas " dis-je.
" Dans ce cas, répondit Abû Bakr, j’irai voir le Messager de Dieu pour me plaindre du fait que tu refuses de riposter contre moi. "

Il se mit en route et je le suivis. Ma tribu, les Banu Asiam, se mirent également en route, me suivant et protestant avec indignation : " Il est celui qui a prononcé le mot en premier, et il va voir le Prophète avant toi pour se plaindre ! " Je me tournai vers eux et dis : " Malheur à vous ! Savez-vous qui est cette personne ? C’est As-Siddîq et il est l’aîné respecté des Musulmans. Retournez sur vos pas avant qu’il ne se retourne, ne vous voit et qu’il ne pense que vous êtes venus m’aider contre lui. Il serait alors encore plus énervé et irait voir le Prophète avec colère. Alors le Prophète se mettrait en colère pour lui. Puis Allâh se mettrait en colère pour eux, et ce serait la fin de Rabî`ah. " Ils firent demi-tour.

Abû Bakr alla trouver le Prophète — paix et bénédictions sur lui — et lui raconta l’incident qui avait eu lieu. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — leva la tête et me dit :

" Ô Rabî`ah ! Qu’est-ce qui ne va pas entre toi et Abû Bakr As-Siddiq ? "
" Messager de Dieu, il voulait que je lui dise les mêmes mots qu’il a prononcés à mon égard et je ne l’ai pas fait. "
" Oui, ne lui dis pas les mêmes mots que ceux qu’il t’a dits. À la place, dis : " qu’Allâh te pardonne Abû Bakr ! "

Abû Bakr s’en alla en disant, les larmes aux yeux : " Qu’Allâh te récompense grandement, Ô Rabî`ah Ibn Ka`b ! Qu’Allâh te récompense grandement, Ô Rabî`ah Ibn Ka`b ! "

P.-S.

Traduit de "Companions of The Prophet", Vol. 1, de Abdul Wâhid Hâmid.

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