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Le désastre environnemental en Irak

dimanche 2 février 2003

La guerre du Golfe et les sanctions économiques imposées par le Conseil de Sécurité de l’ONU en 1990 ont eu un effet désastreux pour l’environnement en Irak. L’eau, le sol et l’air ont été fortement pollués. Des éléments vitaux tels que l’eau potable sont aujourd’hui contaminés et présentent des risques sévères pour la santé. Le simple fait de respirer peut avoir des conséquences dramatiques. D’aucuns pourraient dés lors s’étonner du fait qu’avant la guerre du Golfe, l’Irak possédait un des niveaux de vie les plus élevés du Moyen-Orient.

Selon le rapport des donateurs de l’UNICEF du 31 août 2000, un rapport de l’ONU décrit l’Irak du milieu des années 80 comme un Etat s’approchant des normes des pays développés. Le pays possèdait un système de santé élaboré, un réseau de télécommunications moderne, vingt-quatre centrales électriques, des installations sophistiquées pour le traitement des eaux usées et la majorité de la population avait accès à l’eau potable.

Boire de l’eau : un risque pour la santé

Les installations d’épuration des eaux et de recyclage des eaux usées ont été les premières cibles des bombardements durant l’opération "Tempête du Désert". Les sanctions qui lui ont succédé ont eu pour conséquence de priver l’Irak des pièces détachées nécessaires à leur réparation. Ainsi l’épuration des eaux et le traitement des eaux usées sont pratiquement inexistants, d’autant que la chlorine, le principal désinfectant utilisé dans le traitement des eaux, est sous embargo puisqu’il tombe sous la réglementation du double usage. Bien que de la chlorine soit produite au niveau local, elle suffit à peine pour l’eau potable, le traitement des eaux usées étant de ce fait quasi-nul. Ceci crée un cercle vicieux puisque les eaux usées sont déversées telles quelles dans les rivières dont l’eau ne subit pas le traitement adéquat par manque de chlorine et autres désinfectants du même type : les gens boivent ainsi de l’eau contaminée. S’ensuit alors l’émergence de maladies liées à l’ingestion d’eaux polluées, comme le typhus, la dysenterie, le choléra et la poliomyélite, cette dernière réapparaissant alors qu’elle avait été quasiment éradiquée avant l’instauration des sanctions.

Les professionnels de l’industrie du traitement des eaux, les ingénieurs comme les techniciens, quittent leur emploi pour des emplois mieux payés. Même si peu d’emplois sont disponibles, il est plus avantageux de vendre des cigarettes dans la rue que de travailler en tant qu’ingénieur qualifié dans le traitement des eaux. La population a augmenté au cours des onze dernières années sans que des projets ne soient mis en place pour faire face cette croissance. Selon l’UNICEF, "l’accès à l’eau potable est passé de 100% à 94 % dans les zones urbaines et de 71% à 41% dans les zones rurales. Quelque 250 à 300 tonnes d’eaux usées non traitées sont quotidiennement déversées directement dans les cours d’eau. Seule 25% de la population est desservie par un système de canalisations des eaux usées. Des coupures de courant de douze heures par jour perturbent sévèrement ces services."

"Tempête du désert" à l’origine du déversement de tonnes d’uranium

L’utilisation d’armes chargées d’uranium appauvri durant la guerre du Golfe et les mesures prises par le gouvernement irakien pour décontaminer les champs de bataille ont multiplié par six le nombre de cas de cancer. L’uranium appauvri est un déchet nucléaire issu de la production d’énergie par les réacteurs nucléaires et les bombes atomiques. Les Etats-Unis en possèdent un stock énorme, résultat de 50 années de production d’armes et d’énergie nucléaires. Comme l’uranium appauvri dégage 60% de radioactivité de plus que l’uranium naturel et possède une période de demi-vie de 4,5 milliards d’années, il doit être stocké de manière sûre et permanente, ce qui coûte cher. Pour réduire le stock et ainsi épargner de l’argent, le Département de la Défense et de l’Énergie donne cet uranium appauvri gratuitement aux fabricants d’armes aussi bien sur le territoire national qu’à l’étranger. On peut lire ainsi dans une déclaration de presse du 4 août 1998 du Département de la Défense : "La guerre du Golfe a été le premier champ de bataille où il a été fait usage de munitions à forte pénétration et de véhicules à blindage renforcé contenant de l’uranium appauvri."

Lorsqu’un projectile chargé d’uranium appauvri touche sa cible, de la poussière d’uranium appauvri se libère dans l’air, l’eau et le sol, pénétrant ainsi la chaîne alimentaire. Lorsque cette poussière entre dans le corps humain par inhalation ou ingestion, elle provoque la mort des cellules ou cause des mutations génétiques cancérigènes. Selon les médecins du Collège des médecins de l’Université de Bassora, l’Irak a connu entre 1990 et 1999 une augmentation de 100% des différentes formes de leucémie. L’augmentation des tumeurs malignes chez les enfants contaminés est de 242% entre 1990 et 1999. Lorsque la poussière passe dans la circulation sanguine par ingestion ou inhalation, elle se dépose sur les os, les organes, les cellules où elle agit comme une toxine chimique et radiologique tout au long de la vie de la victime. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, la contamination par l’uranium appauvri peut provoquer des dysfonctionnements rénaux (chimiotoxicité), des cancers des poumons et des os (radiotoxicité) et il serait nécessaire de collecter davantage d’informations concernant les cas de leucémie.

Les enfants exposés à la poussière d’uranium appauvri sont les plus vulnérables, car leurs cellules se divisent rapidement. La poussière traverse également la barrière du placenta et affecte le fœtus provoquant anomalies congénitales et cancers. L’uranium appauvri a sans doute contaminé les sols et les eaux irakiens entraînant ainsi des risques toxiques et radioactifs pour plusieurs générations. On estime que 300 tonnes d’uranium appauvri ont été utilisées dans cette zone, affectant des milliers d’Irakiens.

Le pétrole irakien : bénédiction ou malédiction ?

Les raffineries de pétrole ont été également prises pour cibles lors de la guerre du Golfe. Elles ont toutes été réparées avec du matériel local, mais, par manque d’équipement adéquat notamment de pièces détachées nécessaires au recyclage des déchets industriels, elles contribuent à la pollution de l’environnement. Les unités de production produisent jusqu’à 600 mètres cubes de déchets industriels par heure. Ces déchets sont ensuite déversés dans des puits ou des canaux percés à cet effet. Des gaz toxiques tels que le sulfure d’hydrogène polluent l’air et mettent en danger les ouvriers travaillant dans les raffineries.

Le Golfe Persique (naturellement sujet à pollution du fait de sa faible profondeur de 29,5 mètres) a été fortement pollué par les guerres successives au cours des 20 dernières années. Les déversements de pétrole durant la guerre Iran-Irak entre 1980 et 1988 étaient l’une des conséquences des attaques contre des pétroliers lors de leur passage dans le Golfe. Des milliers de barils de pétrole ont ainsi été déversés dans ses eaux. Durant la guerre du Golfe, l’Irak a intentionnellement pompé environ 5,7 millions de barils de pétrole brut dans le Golfe depuis le terminal des supertankers de Sea Island à 10 milles des côtes koweïtiennes, ce qui constitue une menace terrible pour la vie marine.

Une agriculture en décrépitude

A côté de la pollution, le peuple irakien doit faire face à une pénurie de nourriture. Le manque de matériel, l’absence de fertilisants et d’herbicides nécessaires à l’agriculture a entraîné une baisse des récoltes et une piètre qualité des produits, malgré l’augmentation de la surface cultivée dans le but d’atteindre une auto-suffisance alimentaire.

Le cheptel irakien a également fortement diminué depuis 1990. Selon la FAO, l’Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, le nombre de bovins a diminué de 34% entre 1990 et 1995, le nombre de buffles de 46%, le nombre de moutons de 42% et le nombre de chèvres de 81%. Cette diminution résulte principalement du manque de matériel agricole, de nourriture, de l’absence de services vétérinaires et des vaccins indispensables. Les maladies telles que la fièvre aphteuse, les larves de lucilies bouchères, la peste des petits ruminants et la brucellose se sont transformées en véritables épidémies du fait de l’absence de vaccins capables de les enrayer. La pisciculture souffre des mêmes manques : manque de matériel, de nourriture et de produits de laboratoire et d’hormones.

L’impact de la sécheresse de 1999 a été exacerbé par l’absence de projets d’irrigation et d’équipement. Selon la FAO, les niveaux d’eau du Tigre et de l’Euphrate sont de 40% en dessous de leur niveau normal. En conséquence, la production de blé a reculé de 63% par rapport à la normale et la production d’orge a reculé de 37%.

La guerre du Golfe et les sanctions qui ont suivi ont affecté l’environnement en Irak et dans l’ensemble de la région de manière dramatique. Le peuple irakien subit ces sanctions depuis près de 11 ans, au détriment de sa vie et de sa santé. Plus d’un million et demi d’Irakiens sont morts dont une majorité d’enfants. Cinq à six mille enfants meurent tous les mois. L’instauration des sanctions par le Conseil de Sécurité de l’ONU a privé le peuple irakien de ses droits les plus fondamentaux tels qu’ils sont définis dans le Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, y compris le droit à la vie et à la santé. La première victime de ces sanctions extrêmes et brutales qui sont les plus sévères qu’ait connu le monde moderne est le peuple irakien et non le gouvernement.

P.-S.

Traduit de l’anglais du site Islamonline.net

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