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En Compagnie de l’Élu

La punition de Kaʿb Ibn Al-Ashraf et des Banû Qaynuqâʿ

samedi 8 septembre 2007

La bataille de Badr marqua profondément les esprits des Mecquois, même s’ils réagirent de manière inégale. Abû Sufyân voua de ne point approcher sa femme avant de livrer bataille contre Muhammad. Hind Bint ʿUtbah quant à elle s’abstint de pleurer son père, son oncle et son frère pour ne pas donner cette satisfaction aux Musulmans et jusqu’à ce qu’elle se soit vengée de Muhammad et ses compagnons. Elle abandonna la couche d’Abû Sufyân et s’interdit de parfum et de maquillage jusqu’à ce qu’on eut livré bataille à Muhammad et vengé les êtres chers. Pour leur part, les femmes qurayshites se tondirent la tête ; elles amenaient le cheval ou le chameau de leur parent tué à Badr et pleuraient et se lamentaient à côté. Elles firent cela pendant un mois, chacun appelant la vengeance de ses vœux...

Les Juifs et les polythéistes médinois virent le pouvoir du Prophète — paix et bénédictions sur lui — croître. Arrivé à Médine depuis moins de deux ans fuyant La Mecque, il était quasiment devenu l’homme obéi de Médine, sans oublier que les événements de Badr avaient renforcé les Musulmans. Ils se mirent donc à comploter contre le Prophète — paix et bénédictions sur lui — et contre les Musulmans. Ils envoyaient des gens à La Mecque inciter ses habitants à se venger et chanter des poèmes à la mémoire des morts qurayshites. À la tête des instigateurs il y avait Kaʿb Ibn Al-Ashraf le Juif. Lorsque ce dernier fut informé de la mort des chefs mecquois à Badr, il dit : « Ceux-là étaient les notables des Arabes et les rois des gens. Par Allâh, si Muhammad a atteint ces gens, mieux vaut être sous terre que sur terre. » Puis il se rendit à La Mecque afin d’inciter ses habitants contre le Prophète — paix et bénédictions sur lui —, il déclama des poèmes et pleura les gens de la fosse. De retour à Medine, il se mit à dire des poèmes licencieux au sujet des femmes musulmanes, ce qui ne manqua pas d’enrager les Musulmans. Certains décidèrent donc de le tuer. Abû Nâ’ilah alla le voir, et essaya de se l’attirer en médisant le Prophète — paix et bénédictions sur lui — et les Musulmans. Lorsque Kaʿb Ibn Al-Ashraf rentra dans son jeu, il lui demanda un prêt pour lui-même et pour quelques amis. Kaʿb accepta à condition qu’ils lui hypothèquent leurs épouses. Abû Nâ’ilah s’exclama : « Hypothéquer nos épouses alors que tu es l’homme le plus séduisant, si bien que nous deviendrons la risée des Arabes ? Impossible, mais nous pourrions hypothéquer nos boucliers et nos épées. » Kaʿb accepta l’offre et leur demanda de repasser le voir à un autre moment. Quelque temps plus tard, Abû Nâ’ilah se rendit chez lui de nuit et l’appela depuis l’extérieur de sa forteresse. Kaʿb descendit et les deux hommes marchèrent jusqu’à ce qu’ils eurent retrouvé les amis d’Abû Nâ’ilah. Ils se promenèrent un peu jusqu’à ce qu’ils se soient éloignés de la forteresse de Kaʿb Ibn Al-Ashraf, puis ils frappèrent ce dernier lui donnant la mort.

Cet événement exacerba non seulement les craintes des Juifs, mais aussi leurs complots et leurs provocations à l’encontre les Musulmans. Ainsi profitèrent-ils de la présence d’une femme musulmane venue vendre un bijou en or à un joailler des Banû Qaynuqâʿ pour la harasser. Pendant qu’elle était assise, l’un d’entre eux l’approcha par derrière à son insu et accrocha le revers de sa jupe à son dos. Lorsque la femme se leva, elle se trouva déshabillée. Les Juifs se mirent à rire ; la femme cria au secours. Un homme musulman bondit sur le Juif et le tua ; les Juifs se jetèrent sur lui et le tuèrent à son tour. Cet incident constituait un revirement dangereux, il s’agissait désormais d’honneur et de dignité. Ces choses étaient plus précieuses que la vie aux yeux des Arabes depuis l’ère pré-islamique. Comment en serait-il autrement après que Dieu les eut honorés par l’islam. La colère gronda donc parmi les Musulmans. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — envoya un avertissement aux Banû Qaynuqâʿ leur demandant de respecter le pacte de bon voisinage qu’il avait passé avec eux lors de son arrivée à Médine — d’autant plus qu’ils habitaient dans Médine et non à l’extérieur et qu’ils vivaient parmi les Musulmans et traitaient avec eux —, faute de quoi ils connaîtraient le même sort que les Qurayshites à Badr. Mais ils prirent son avertissement à la légère et lui envoyèrent un émissaire disant : « Ô Muhammad, ne sois pas enorgueilli du fait que tu as tué une poignée de vauriens qurayshites ne sachant pas se battre. Si tu nous combattais, tu saurais notre valeur et que tu n’as jamais confronté personne comme nous. » [1]

Après ce discours, les Musulmans étaient face à une alternative : soit ils se taisaient et perdaient le respect d’autrui, soit ils se battaient. Par conséquent, les Musulmans imposèrent un siège de quinze jours consécutifs aux Banû Qaynuqâʿ, interdisant le passage de toute nourriture et la circulation des individus, jusqu’à ce qu’ils se décident à accepter le jugement du Messager de Dieu — paix et bénédictions sur lui — à leur encontre. Le Prophète — paix et bénédictions sur lui — consulta ses compagnons qui lui recommandèrent unanimement de les tuer tous. ʿAbd Allâh Ibn Ubayy Ibn Salûl, un allié des Juifs et un homme influent auprès des polythéistes des tribus d’Al-Aws et d’Al-Khazraj, se rendit en urgence auprès du Messager de Dieu et lui dit : « Sois bienfaisant envers mes alliés. » Il insista et répéta sa requête et dit : « Par Allâh, je suis un homme prévoyant craignant l’avenir. » Puis vint ʿUbâdah Ibn As-Sâmit, une figure saillante parmi les Musulmans Ansarites, et lui dit la même chose. Alors, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — accepta l’intercession d’Ibn Salûl et de ʿUbâdah et ordonna l’exil des Banû Qaynuqâʿde Médine en juste salaire de leur méfait. ʿUbâdah Ibn As-Sâmit les conduisit jusqu’à la vallée de Wâdî Al-Qurâ où ils s’installèrent quelque temps avant de partir pour la région de Adhruʿât à la frontière de la Syrie. Les Juifs furent ainsi affaiblis par l’exil des Banû Qaynuqâʿ de Médine.

Médine retrouva le calme après le départ des Banû Qaynuqâʿ. Un jour, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — convia ʿAlî Ibn Abî Tâlib — que Dieu l’agrée — et lui dit : « Ô ʿAlî, Allâh — Exalté soit-Il — m’a ordonné de te donner Fâtimah comme épouse. » Il procéda donc au mariage et lui dit : « Ne fais rien jusqu’à ce que je t’y autorise [2]. » Plus tard, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — le fit venir de nouveau, accomplit ses ablutions dans un récipient, puis l’aspergea de l’eau de ses ablutions disant : « Ô Allâh, bénis leur union, bénis-les, et bénis leur descendance... » Puis, il lui ordonna de consommer le mariage.

Puis, Hafsah Bint ʿUmar perdit son mari, Khunays Ibn Hudhâfah As-Sahmî, un compagnon du Messager de Dieu — paix et bénédictions sur lui — ayant assisté à Badr et décédé à Medine. ʿUmar relata : « J’ai rencontré ʿUthmân Ibn ʿAffân et lui ai proposé la main de Hafsah disant : "Si tu le souhaites, je te donnerai Hafsah la fille de ʿUmar comme épouse." Il a répondu : "Laisse-moi réfléchir à ma situation." Quelques nuits sont passées, puis il m’a répondu : "Je trouve plus sage de ne pas me marier en ce moment." » ʿUmar poursuivit : « J’ai alors rencontré Abû Bakr et lui ai proposé : "Si tu le souhaites, je te donnerai Hafsah la fille de ʿUmar comme épouse." Abû Bakr s’est tu et ne m’a pas donné de réponse. Je lui en ai voulu plus qu’à ʿUthmân. Quelques nuits sont passées, puis le Messager d’Allâh — paix et bénédictions sur lui — l’a demandée en mariage alors je la lui ai mariée. Puis j’ai rencontré Abû Bakr de nouveau ; il m’a dit : "Je suppose que tu m’en as voulu de ne pas avoir répondu à ta proposition d’épouser Hafsah." J’ai répondu par l’affirmative. Il s’est expliqué : "Je ne me suis abstenu de te répondre que parce que je savais que le Messager d’Allâh — paix et bénédictions sur lui — l’avait évoquée. Je ne pouvais donc pas divulguer le secret du Messager d’Allâh — paix et bénédictions sur lui —. S’il avait changé d’avis, je l’aurais acceptée volontiers." » [3]

Un jour, le Prophète — paix et bénédictions sur lui — se rendit chez ʿUthmân Ibn ʿAffân — que Dieu l’agrée — et le trouva effondré pleurant sa défunte épouse Ruqayyah, qui venait de décéder lorsque la nouvelle de la victoire de Badr parvint à Médine. Il lui dit : « Qu’as-tu, ʿUthmân ? » Il répondit : « Ô Messager d’Allâh, y a-t-il plus grande épreuve que la mienne ? Ta fille, ô Messager d’Allâh, était mon épouse... Elle est morte... et mes liens de parenté avec toi se sont rompus par la même occasion... » Aussitôt que ʿUthmân avait fini sa phrase, Jibrîl descendait sur le Prophète — paix et bénédiction sur lui —. Celui-ci se tourna vers ʿUthmân et lui annonça : « Ô ʿUthmân, Jibrîl m’a apporté l’ordre d’Allâh de te marier à sa sœur Umm Kulthûm, pour la même dot et le même traitement. » [4]

P.-S.

Traduit de l’arabe du livre de Sheikh Yâsîn Rushdî, Fî Rihâb Al-Mustafâ (En Compagnie de l’Élu), disponible au format PDF sur le site Mouassa.org.

Notes

[1Rapporté par Abû Dâwûd, dans le livre de l’impôt foncier, de la gouvernance et du butin.

[2C’est-à-dire qu’il lui ordonna de ne pas consommer le mariage.

[3Rapporté par Al-Bukhârî dans le livre des expéditions.

[4Rapporté selon un énoncé similaire par Abû Hurayrah — que Dieu l’agrée —. Conférer Al-Isâbah, numéro 12 222, volume 8, page 290.

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