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Mawlânâ Mujâhid Al-Islâm Al-Qâsimî

lundi 17 avril 2006

Mujâhid Al-Islâm Al-Qâsimî (1936 - 2002)

Le Juge Mujâhid Al-Islâm Al-Qâsimî fut un éminent jurisconsulte du subcontinent indien à la fin du XXe siècle et une autorité internationalement reconnue dans les sciences juridiques islamiques. Ses connaissances encyclopédiques et ses analyses des problèmes de la vie contemporaine firent de lui un savant respecté et aimé de la communauté musulmane indienne. Pendant près de 40 ans, il occupa le poste de Grand Cadi à l’institution religieuse de l’Émirat de la Sharîʿah pour les États indiens du Bihâr, de l’Orissa et du Jharkhand. Parallèlement, il se consacra à l’étude des sources historiques du droit et de ses mécanismes de développement. Activement impliqué dans la vie sociale, il se dédia à l’écoute des problèmes des gens afin de les aider à parvenir à un avenir meilleur à la lumière de la guidance de l’Islam.

Naissance et jeunesse

Le Sheikh Mujâhid Al-Islâm Al-Qâsimî naquit le 9 octobre 1936, dans le village rural de Jalah, non loin de la ville de Darbhanga, dans l’Etat du Bihâr, au nord-est de l’Inde. Son père, le Sheikh ʿAbd Al-Ahad Al-Qâsimî (1880 - 1947) était un savant religieux et un juge. Il avait été autrefois l’élève du Sheikh Mahmûd Hasan Ad-Diyûbandî (1851 - 1920), surnommé le Sheikh de l’Inde.

Pendant ses études primaire et secondaire, Mujâhid Al-Islâm Al-Qâsimî fréquenta plusieurs établissements dans son Bihâr natal et dans l’Uttar Pradesh. En 1951, il rejoignit la plus grande université islamique du subcontinent indien, l’Université Dâr Al-ʿUlûm Deoband. Il y décrocha son diplôme en 1955 après quatre années d’études religieuses. Il eut pour professeurs les Sheikhs Husayn Ahmad Al-Madanî (d. 1957), Muhammad Ibrâhîm Al-Bilyâwî (d. 1967), Muhammad Iʿzâz ʿAlî Al-Amrûhuwwî (d. 1952), Fakhr Al-Hasan Al-Murâd Âbâdî (d. 1980), Muhammad Hasan Al-Bîhârî (d. 1992) et Miʿrâj Al-Haqq Ad-Diyûbandî (d. 1991), tous de valeureux savants déobandis.

Activités et fonctions

Après avoir achevé ses études universitaires à l’âge précoce de 19 ans, il se lia au savant indien et leader chevronné, Sheikh Minnat Allâh Ar-Rahmânî (d. 1991). Ce dernier fit en effet appel au Sheikh Al-Qâsimî et le désigna au poste d’enseignant dans l’Université Ar-Rahmâniyyah que lui-même avait fondée dans la ville de Monghyr, dans le Bihâr. Sheikh Al-Qâsimî occupa ce poste entre 1955 et 1962 et y enseigna entre autres le droit et le Hadîth. Ce fut l’occasion pour lui de montrer à son bienfaiteur le degré d’intelligence, d’érudition, et de force de persuasion dont il était doté. Sheikh Ar-Rahmânî l’entoura alors de ses soins, le façonna et l’éduqua à ses manières fort nobles. Il le nomma ainsi en 1961 Grand Cadi à l’Émirat de la Sharîʿah, qui est une institution islamique au service, depuis près d’un siècle, des Musulmans des régions orientales de l’Inde, et dont le siège est à Patna, capitale du Bihâr. Cette institution était dirigée à l’époque par Sheikh Minnat Allâh Ar-Rahmânî qui portait logiquement le titre d’Émir de la Sharîʿah. Grâce aux efforts d’une longue liste de savants musulmans, à la tête desquels figuraient les Sheikhs Ar-Rahmânî et Al-Qâsimî, qui deviendrait plus tard vice-Émir de la Sharîʿah, cette institution étendit sa sphère d’influence à la majorité des États et territoires indiens, tout en diversifiant ses activités. Aujourd’hui, elle accompagne les Musulmans d’Inde à travers ses services juridico-islamiques, sociaux, humanitaires, éducatifs et médicaux. Pendant les quarante années que le Juge Al-Qâsimî passa au sein de cette institution, en tant que Cadi tranchant les litiges, il se forgea une réputation sans pareille, au point que les Musulmans indiens associent automatiquement le mot "Cadi" à Sheikh Al-Qâsimî. Parler du Juge sans autre précision, c’est parler de Mawlânâ Mujâhid Al-Islâm Al-Qâsimî.

La deuxième institution religieuse la plus puissante au sein de la communauté musulmane indienne, pour laquelle travaillait également Sheikh Al-Qâsimî, était le All India Muslim Personal Law Board (AIMPLB). Créée en 1972 sous l’impulsion des Sheikhs Minnat Allâh Ar-Rahmânî, Muhammad Tayyib (ancien doyen de l’Université de Deoband, mort en 1983) et Mujâhid Al-Islâm Al-Qâsimî, cette institution a pour but de défendre le droit des Musulmans à appliquer les lois islamiques concernant le statut personnel et à conserver leur identité culturelle et religieuse, et ce dans un pays laïque, à majorité hindoue, comme l’Inde. Sheikh Al-Qâsimî fut le troisième Président de l’AIMPLB, après Sheikh Muhammad Tayyib et Mawlânâ Abû Al-Hasan An-Nadwî, auquel il succéda à sa mort en 1999. Malgré son état de santé fragile, il passa les trois années qui lui restaient de sa vie à défendre ses idées et ses idéaux et parvint à convaincre l’élite intellectuelle indienne de la justesse de ses vues et du bien-fondé de l’activité de l’AIMPLB.

En 1992, Mawlânâ Al-Qâsimî fonda le All India Milli Council (AIML) qui est une structure dont les objectifs sont de promouvoir politiquement et médiatiquement les causes de la communauté musulmane indienne auprès de l’opinion publique du pays. Malgré des moyens très maigres, cette association s’inscrit nettement aujourd’hui dans le paysage politique indien, aidée notamment par une stratégie d’apaisement, de solidarité et de compréhension à l’égard de la majorité hindoue. Sheikh Al-Qâsimî avait en effet saisi qu’un demi-siècle après l’indépendance de l’Inde, la stratégie de confrontation entre les deux communautés religieuses ne pouvait servir les intérêts de l’Islam et des Musulmans, dans ce pays à majorité non-musulmane, où existaient certains courants hindous extrémistes qui s’exprimaient par la violence envers les minorités religieuses.

Une autorité islamique internationalement reconnue

Mawlânâ Mujâhid Al-Islâm Al-Qâsimî fonda par ailleurs en 1989 l’Académie Indienne de Jurisprudence Islamique (Islamic Fiqh Academy - India) dont l’activité consiste à étudier les problématiques contemporaines et à élaborer des solutions à la lumière des principes directeurs de l’Islam, laquelle activité constituait le pôle d’excellence du Juge Al-Qâsimî.

Il fut également membre de nombreuses autres institutions à l’instar de l’Académie Internationale de Jurisprudence Islamique basée à Djedda, l’Académie de Jurisprudence Islamique de la Ligue Islamique Mondiale basée à La Mecque ou l’Académie Arabe à Damas.

Le Juge Al-Qâsimî fut également professeur de Littérature arabe à l’Université de Deoband. Il fut, par ailleurs, le rédacteur en chef de la revue arabophone mensuelle Ad-Dâʿî, publiée par l’Université de Deoband, et de la revue arabophone Bahth wa Nadhar. En outre, il dirigea la revue mensuelle en langue urdue Millî Ittihâd.

Dans un souci permanent d’encadrer, de former et d’éduquer la jeunesse musulmane, il créa de nombreux centres et instituts de formation technique et professionnelle.

Sur le plan international, il fut invité à participer à de nombreux colloques et conférences dans plusieurs pays du monde, parmi lesquels l’Arabie Saoudite, le Koweït, les Émirats Arabes Unis, le Pakistan, le Bangladesh, Bruneï, l’Ouzbékistan, le Qatar, le Royaume-Uni, l’Iran, les Etats-Unis, l’Afrique du Sud ou encore Bahreïn. Ce fut l’occasion pour lui d’échanger ses vues, mais surtout pour les savants musulmans du monde entier, de bénéficier de ses analyses pertinentes dans la compréhension et l’application du droit musulman notamment.

Bibliographie

Mawlânâ Mujâhid Al-Islâm Al-Qâsimî laissa à la postérité plus de 24 ouvrages en arabe et en urdu, abordant des sujets très différents, allant de la jurisprudence, aux questions médicales, à l’économie, à la politique et à l’éducation. Ces thèmes variés mais magistralement traités sont le meilleur reflet de son savoir encyclopédique. Parmi ses livres, on peut citer :

  1. Nidhâm Al-Qadâ’ fî Al-Islâm (Le Système judiciaire musulman) (arabe),
  2. Qadâyâ Fiqhiyyah Muʿâsirah (Questions juridiques contemporaines) (arabe),
  3. Islâmî ʿAdâlah (La Justice islamique) (urdu),
  4. Tibbî Akhlâqiyyât (Éthique médicale) (urdu).
  5. Jadîd Tijârî Shaklîn (Les Nouvelles Formes de Commerce) (urdu).

Avec l’aide de ses étudiants, le Juge Al-Qâsimî traduisit par ailleurs de l’arabe vers l’urdu l’Encyclopédie Juridique Koweïtienne, ouvrage de référence pour les juristes musulmans contemporains. Cette Encyclopédie avait été achevée après 35 années de travaux assidûs. Mawlânâ Al-Qâsimî et son équipe achevèrent sa traduction en moins de trois ans.

Retour à Dieu

Après une longue bataille contre le cancer et une vie dédiée à la diffusion du savoir et des valeurs islamiques, dans un esprit positif d’unification de la nation islamique au nom de l’Unité divine, Mawlânâ Mujâhid Al-Islâm Al-Qâsimî rendit son dernier soupir à l’âge de 65 ans, le 4 avril 2002 à New Delhi.

Que Dieu lui fasse miséricorde.

P.-S.

Sources : Wvvw.net, Al-Haras Al-Watanî, revue publiée par la Garde Civile saoudienne, et la Revue de l’Académie de Jurisprudence Islamique de la Ligue Islamique Mondiale, numéro 16, 2003, pages 277-280.

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