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Chagrins d’un prédicateur
Section : Ils sont les enfants d’Israël... Les enfants de qui sommes nous ?

La mascarade de la séparation de l’arabité et de l’islam

lundi 13 octobre 2003

Vinrent ensuite ces jours calamiteux où certains Arabes, oubliant `Umar, l’islam et l’histoire dans son ensemble, affirment désormais : "Nous sommes les enfants de Canaan !" ensorcelés qu’ils sont par le colonialisme mondial qui a aboli la religion pour lui substituer le nationalisme ou le patriotisme.

Il ne manquerait plus que les Arabes du sud de la Péninsule déclarent à leur tour : "Nous sommes les enfants de `Âd !" et que ceux du nord de la Péninsule clament : "Nous sommes les enfants de Thamûd !"

À l’heure où les Arabes se dévêtissent de leur religion pour vivre l’intimité à l’air, les juifs se drapent de leurs croyances et clament avec un grand enthousiasme : "Nous sommes les enfants de la Thora et les fils des prophètes. Nous sommes les enfants d’Israël !"

Toujours dans le cadre de cette mascarade de la désislamisation de l’arabité, aussi bien sur le plan international que dans le domaine de l’éducation, nous constatons, non sans étonnement, que des responsables de l’Organisation de la Conférence Islamique (OCI), choqués par le massacre perpétré par les juifs à l’encontre des Arabes de l’intérieur d’Israël, se sont précipités à la porte du Vatican pour demander au Pape de secourir leurs frères ! Ils le lui ont demandé au nom de l’humanité commune à tous, et non pas, me semble-t-il, au nom de la révélation divine qui réunit les trois religions...

La réponse est tombée...

Les journaux ont rapporté que le Pape s’est adressé à cent mille fidèles, venus célébrer l’entrée du Christ à Jérusalem ! Il leur a dit : "Nous ne pouvons pas ne pas avoir une pensée pour la terre du Christ, la terre de Palestine, là où le Christ est venu enseigner l’amour et là où il est mort pour que l’humanité se réconcilie entre elle." Puis il a exprimé l’espoir que viendrait un jour où les deux peuples vivant sur cette terre reconnaîtraient chacun l’existence et la réalité de l’autre, afin que les deux parties - Arabes et Juifs - puissent vivre en paix !

Le 5 avril 1982, le quotidien qatari Ar-Râyah a publié dans un article intitulé "La montagne accoucha..." : "Sa Sainteté a enfin trouvé le temps pour daigner dire un mot sur les territoires occupés. La Palestine y a enfin eu droit après une longue attente. Et nous sommes en droit de dire à sa Sainteté : Bon réveil !"

L’auteur de l’article écrit : "Si nous analysons les propos du prêche, nous voyons que ce que la verve du Pape a bien voulu exprimer suscite l’étonnement. C’en était trop pour sa Sainteté de mentionner les Arabes - le peuple persécuté des territoires occupés - confondant dans son discours l’assassin et la victime. Plus étonnant encore est le fait qu’il mette sur un pied d’égalité le droit du peuple palestinien à sa terre et les prétentions usurpatrices des colonisateurs sionistes. Il a aussi décidé de considérer les scélérats venus d’ailleurs comme un autre peuple qui concurrence les Arabes sur leur terre."

Je pense que quiconque s’attend à autre chose de la part du Pontife romain se trompe et connaît mal la réalité du christianisme. D’autres Arabes sont tombés dans le même écueil en demandant le secours du Conseil Œcuménique des Eglises [1] pour en revenir bredouilles.

Le christianisme approuve l’établissement d’Israël et considère le retour des Juifs en Palestine comme une prophétie témoignant de la véracité de la Bible [2]. Aussi Weizman rappelle-t-il dans ses mémoires que Lord Balfour et les autres ministres britanniques ne faisaient que rendre un culte à Dieu en émettant la déclaration du foyer national [3] ; ils ne faisaient que représenter la foi chrétienne !

Puis-je dire que les Arabes ne lisent pas et qu’ils ignorent véritablement cela ? Je ne pense pas.

En réalité, les Arabes ont été ensorcelés par l’invasion culturelle et ont cru que les nationalismes modernes s’étaient défaits de leurs croyances premières. Ils se sont alors désolidarisés de leurs bases et ont délaissé leur religion tandis que leurs adversaires ont conservé leurs sentiments d’antan...

Et admettons que les autres oublient ou tentent d’oublier le passé, cela justifie-t-il la mécréance, la perversité et la désobéissance ? La cause palestinienne en particulier ne peut être dissociée de sa dimension religieuse. Dire qu’il faut chasser les colons sionistes de nos contrées, tout comme il faut chasser les colons blancs d’Afrique du Sud et que les deux régimes sont fondés sur une idéologie raciste, est un enrobage insipide de vérités amères.

L’agression juive appuyée par les forces croisées internationales a un objectif précis et connu : décimer une nation et éradiquer une religion ; en finir avec la nation arabe qui a porté l’islam pendant quatorze siècles et qui lui est encore fidèle dans la forme, à défaut de l’être sur le fond.

Ceux qui écartent l’islam de la lutte palestinienne contribuent à la réalisation de cette fin car, privée du mobile islamique, la Palestine est vouée à disparaître. Les Arabes après cela ne seront plus. Et les musulmans après la disparition des Arabes seront fatalement touchés. Tel est le plan.

Le fait que les Arabes soient imbus de leurs personnes, fiers de leur race et qu’ils parlent de la civilisation de Canaan, de Qahtân et de `Adnân, à supposer que ces derniers avaient une civilisation, revient à poignarder la fraternité islamique de part en part. Si à cette vanité on ajoute l’oubli du bienfait de l’islam et la mise en place d’une nouvelle dynamique moderne où les Arabes sont conduits par les communistes, les chrétiens et les musulmans, alors ce sera un retour en arrière qui emmènera les Arabes à leur mort et fera d’eux des réfugiés sans patrie ni religion !

Je suis un musulman arabe - natif d’Égypte. J’imagine l’un de nos frères du Turkestan venu me faire des reproches :

"Ô frère arabe, jadis nous avons volé à votre secours au nom unique de l’islam. Sais-tu quand cela est arrivé ? Lorsque Bagdad tomba sous les pieds des Tatars et que le califat et le Calife furent conjointement assassinés. Les ténèbres couvrirent alors tous les horizons et les Tatars ainsi que leur chef firent courir le bruit que leur armée était invincible ! À ce moment, l’un des nôtres, Qutuz, se mobilisa. Les fuyards s’arrêtèrent et les apeurés se raffermirent. Et par son cri sincère et courageux Wâ islâmâh !, il vainquit les Tatars à `Ayn Jâlût et les pourchassa jusqu’à ce qu’ils les eut décimés et qu’on n’en entendit plus parler... Te souviens-tu de cela ?"

Je répondrai : "Je m’en souviens. Comment pourrais-je l’oublier ?"

Il poursuivra : "Je ne te parle même pas de nos services culturels rendus au Livre et à la Sunnah, ni des Imâms du Hadîth issus de nos contrées à commencer par leur Emir, Abû `Abd Allâh Al-Bukhârî, ni des Imâms de l’Exégèse avec, à leur tête, Ar-Râzî et Az-Zamakhsharî."

Je répondrai : "Nous ne nions pas vos bienfaits sur les sciences islamiques."

Il affirmera alors : "À vrai dire, vous nous avez complètement oubliés. Vous nous avez laissés seuls combattre La Russie tsariste jusqu’à ce que les croisés réussissent à occuper notre terre. Puis vous nous avez laissés seuls combattre la Russie communiste jusqu’à ce qu’elle réussisse à nous soumettre et à nous mettre à genoux, considérant notre terre comme une partie indissociable de l’Union Soviétique. Vous n’avez ni pleuré nos morts, ni payé le prix du sang de nos combattants, ni parlé de nos causes. Vous êtes restés dans un silence étrange. Pourquoi tant d’ingratitude ?"

Que puis-je dire ou répondre ? L’enfermement des Arabes dans le cadre de leurs seuls intérêts privés est un vice honteux et leur intérêt exclusif pour leurs causes un égoïsme vil.

Au cours de la Première Guerre mondiale, la grande révolution arabe rallia les Anglais dans leur lutte contre les Turcs et précipita leur défaite. Quel profit les Arabes en ont-ils tiré ? Les Anglais ont fait de la Palestine une patrie pour les Juifs. Le califat, qui, du temps de `Abd Al-Hamîd [4], avait refusé de vendre la Palestine contre une fortune colossale est tombé. Un ressentiment terrible s’est installé entre les Turcs et les Arabes et s’est soldé par l’apostasie du gouvernement turc.

Ne craignons-nous pas Allâh vis-à-vis de notre religion et de notre message après ces conséquences effroyables ? N’est-il pas temps de nous attacher à l’islam par lequel Dieu nous a honorés et de diriger vers lui notre loyauté maintenant qu’il s’est avéré que tout en dehors de lui était sinistre ?

Dans la fièvre de l’arabisme, l’étude de l’Histoire a connu une falsification extraordinaire. Le héros kurde musulman, Salâheddîn Al-Ayyûbî, a été présenté comme le défenseur du nationalisme arabe ! Or, ce géant ne connaissait aucun nationalisme, ni le nationalisme arabe, ni le nationalisme kurde. Il était musulman seulement.

Lors d’une célébration organisée au Ramadân dernier, une dispute a éclaté entre un ambassadeur arabe et moi parce qu’il voulait faire de Salâheddîn un héros arabe. Sans l’intervention de quelques gens raisonnés, le pire serait arrivé !

Il y a un quart de siècle, un grand Sheikh interpella les gens du haut de la chaire de la Mosquée Al-Aqsâ à Jérusalem en ces termes : "Ô Arabes !" Les orants se fâchèrent car ils s’attendaient plutôt à l’interpellation classique mais magnifique : "Ô musulmans !"

Écarter les Arabes de l’islam est une trahison de la nation en plus d’être une apostasie de la religion. Et ceux qui suivent cette voie ne font que servir les intérêts sionistes et communistes : "Que ceux, donc, qui s’opposent à Son commandement prennent garde qu’une épreuve ne les atteigne, ou que ne les atteigne un châtiment douloureux." [5]

P.-S.

Traduit de l’arabe aux éditions Nahdat Misr.

Notes

[1Pour en savoir plus sur le COE, voir son site internet. NdT.

[2Cette position est ouvertement reconnue chez les Protestants, majoritaires outre-manche et outre-atlantique. Pour ce qui est de la position de l’Église catholique, nous laissons au lecteur le soin de suivre son évolution depuis les années 1980. NdT

[3Le texte de la déclaration Balfour peut être consulté sur le site du Monde Diplomatique. NdT

[4`Abd Al-Hamîd II est le dernier Calife ottoman, et par la même occasion, le dernier Calife musulman. NdT

[5Sourate 24, An-Nûr, la Lumière, verset 63.

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